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C’était vendredi ; Dans le tram pour me rendre à la piscine,

la nuit était déjà bien tombée. Toujours l’esprit ailleurs, je me prend la porte de sortie en pleine gueule. J’oublie sans cesse qu’avec ce foutu arrêt, c’est celles de gauche qui s’ouvrent. Je suis pas en train de vous dire qu’il me faut si peu de chose pour que j’entre dans une bonne colère. Mais parfois, surtout le soir, lorsque la journée fut particulièrement chiante, et les personnes qui l’ont habité prodigieusement emmerdantes, alors oui, c’est vrai, il ne m’en faut pas beaucoup plus pour me mettre en rogne.

Ça a commencé je crois, avec cette cliente qui refusait de comprendre que je n’y était pour rien si je ne pouvait lui servir son menu, le matin avant dix heures. Évidement, à l’heure du petit-déjeuner, quoi de plus logique que de vouloir se gaver de frites et de burgers. Mais croyez vous qu’elle va abandonner pour autant vous ?
Ouh, mais là mes cocos, mais vous vous trompez. Ça reste obstinée une vendeuse de chez promod, robe jean sur gros derrière, bottes blanche façon cosmonaute qui remontent jusque dans la gorge si on tire bien, et vieux décolleté tout taché. Mais chut, il paraît que les taches, c’est fait exprès, et que c’est la modeuh ; Vous ai-je parlé de ses boucles d’oreilles au diamètre si grand qu’elles pourraient servir de cercle enflammée pour acrobate de cirque ?
Il a fallut plus de cinq minutes de bataille féroce pour essayer de m’imprégner de son langage peu habile, et parfois (souvent ?), maladroit pour lui faire comprendre qu’avant dix heures, pas de salé.
Le temps de souffler un peu, dix heures arrivent, et la revoilà qui se pointe à nouveau la mignonne.

Toute une journée donc, à voir défiler devant soi, toute une tripoté de personne dans le genre de Madame je suis de promod, j’ai ma carte de 20%.
Alors bien sur, lorsque je sors du tram, il ne m’en faut pas moins pour bousculer ces braves gens qui embrassent presque la porte pour être les premiers à entrer, et trouver un siège ou, fatigués de leur performances physique, ils laisseront ce sourire si satisfait qui nous transformerait presque en machettes humaines prêtent à fondre sur leur faces décrépis.

Et puis une fois dehors, il y a cette femme devant moi, qui semble se diriger vers la piscine. Au bout de quelques minutes, je la vois marcher plus vite, resserrer la hanche de son sac et jeter de bref coup d’œil derrière elle. Il manquait plus que ça tiens. je suis en train de rendre une pauvre nana morte de peur.
Parce que je la suis.
Alors je décide de me rapproche d’elle, et je lui demande si elle aussi, va à la piscine. Aucune réponse. Je retente plusieurs fois, et toujours aucune réponse. Et je comprends qu’elle fait semblant de ne pas m’entendre.

Cette fois-ci, je n’étais plus en colère, j’étais fou de rage. Sous une impulsion soudaine, je pars tout droit vers l’entrée de la piscine ou je l’attends fermement. Parce que j’étais certain que c’était ici qu’elle se dirigeait.
Quelques secondes plus tard, je la vois s’avancer vers moi. Alors je lui sors mon plus beau sourire, et je lui dit : « alors vous alliez bien à la piscine n’est-ce pas ? »
Silence, sourires nerveux, souffle court, des excuses, et après avoir retrouvée son calme et avoir enfilée son jolie maillot, nous nous sommes retrouvés à nager et à parler pendant toute une heure ensemble. Je ne pourrai pas l’expliquer encore aujourd’hui, mais c’était un moment spécial et unique. Il y avait comme un lien ou ce je ne sais quoi qui rend les premiers contacts faciles et forts.
Je ne l’ai plus jamais revu.